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La procédure à date fixe : De la longueur des procédures judiciaires et des moyens pour y remédier

Le 05 décembre 2012

 

La France est –malheureusement – réputée pour la longueur de ses procédures judiciaires et à ce titre, a déjà été condamnée à maintes reprises par la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH, AUTHOUART c. FRANCE, 8 nov. 2005, Requête n° 45338/99).

 

 

 

Plus précisément, en matière de droit de la construction, la procédure se déroule généralement en trois phases :

 

 

 

Ä  La procédure de référé aux fins d’expertise ;

 

Ä  L’expertise en elle-même ;

 

Ä  La procédure au fond, permettant de trancher le litige ;

 

 

 

La procédure peut encore se poursuivre devant la Cour d’appel dès lors qu’une des parties interjette appel.

 

 

 

Or, entre la saisine du juge des référés et le dépôt du rapport d’expertise, généralement plus de neuf mois s’écoulent (Cf. Notice explicative concernant la procédure de référé).

 

 

 

Si plusieurs réunions d’expertise sont nécessaires, il convient d’ajouter à ces neuf mois, une nouvelle période de trois à six mois.

 

 

 

De même, si un sondage doit être réalisé, six à douze mois supplémentaires sont également nécessaires…

 

 

 

Ainsi, le rapport définitif d’expertise sera déposé à l’issue d’une période de neuf à douze mois dans le cas de désordres nécessitant une seule réunion d’expertise, et à l’issue de vingt-quatre, voire trente-six mois dans les cas complexes.

 

 

 

La phase d’expertise est particulièrement importante, puisque le rôle de l’expert est précisément d’éclairer les parties, les assureurs et le cas échéant le Tribunal sur la réalité des désordres allégués, leurs causes et conséquences, ainsi que sur les travaux de reprise nécessaires.

 

 

 

Puis, suite à l’expertise et si aucun accord amiable n’a pu être trouvé, doit être engagée une procédure au fond afin de trancher le litige.

 

 

 

En cas d’urgence, laquelle doit être démontrée, il peut être choisi d’opter pour une procédure à jour fixe, prévue aux articles 788 et suivants du Code de procédure civile.

 

 

 

Hors ces cas d’urgence, et si plusieurs intervenants doivent être attraits à la procédure judiciaire, la durée de cette dernière est comprise dans une période de trois à quatre ans.

 

 

 

Ainsi, il n’est pas rare que la procédure en matière de construction dans les cas complexes avec plusieurs intervenants ne trouve une issue que sept à dix ans après l’introduction de la procédure de référé…

 

 

 

Dès lors, ne pourrait-on s’interroger sur une nouvelle forme de procédure au fond, qui interviendrait donc postérieurement aux opérations d’expertise ?

 

 

 

Cette procédure intermédiaire entre le jour fixe et la procédure au fond telle qu’elle résulte des articles 750 et suivants du Code de procédure civile, serait destinée aux affaires simples ou justifiant une relative urgence : la procédure à date fixe.

 

 

 

 

 

Une telle procédure pourrait se dérouler ainsi :

 

 

 

Le demandeur, comme dans le cadre de la procédure applicable en cas de jour fixe, sollicitera du Président du Tribunal de grande instance pour les litiges relevant de la compétence de ce Tribunal, l’autorisation d’assigner à date fixe.

 

 

 

La requête devra exposer les motifs justifiant que la procédure ne nécessite pas de développements complexes, soutenir la compatibilité du dossier avec la procédure à date fixe.

 

 

 

Cette requête sera accompagnée d’un projet d’assignation à date fixe ainsi que des pièces justificatives comme cela est prévu à l’article 788 du Code de procédure civile, applicable en matière de procédure à jour fixe.

 

 

 

Il appartiendra au Président de la Juridiction, de vérifier la compatibilité du litige avec la procédure : soit le caractère simple de l’affaire soit sa relative urgence.

 

 

 

S’il est fait droit à la requête, l’ordonnance fixera :

 

 

 

Ä  La date d’audience de plaidoirie, dans un délai de 6 à 9 mois à dater de l’ordonnance,

 

 

 

Ä  Et un calendrier de procédure en précisant les dates pour lesquelles chaque partie devra conclure, ce pouvoir appartenant au Juge de la mise en état en application de l’article 764 du Code de procédure civile.

 

 

 

Afin de respecter le principe du contradictoire, il conviendra de procéder à une clôture partielle de la procédure, prononcée à l’encontre de toutes les parties 15 jours avant l’audience de plaidoirie, de sorte qu’à partir de cette clôture partielle, les parties n’auront plus la possibilité de déposer de nouvelles conclusions ou de nouvelles pièces.

 

 

 

Cette règle sera compatible avec le principe du contradictoire et avec l’article 789 du Code de procédure civile, disposant pour la procédure à jour fixe que  « L’assignation informe le défendeur qu’il peut prendre connaissance au greffe de la copie des pièces visées dans la requête et lui fait sommation de communiquer avant la date d’audience celles dont il entend faire état ».

 

 

 

Elle serait également conforme aux articles 779 et suivants du Code de procédure civile, concernant la clôture des procédures engagées devant le Tribunal de grande instance.

 

 

 

Il ne s’agirait cependant que d’une clôture partielle dans la mesure où la procédure sera orale et de fait, les avocats pourront répliquer à l’argumentation développée par leurs contradicteurs dans le cadre de la plaidoirie, tel que cela est prévu en matière de procédure à jour fixe, l’article 792 prévoyant à cet effet : « Si le défendeur a constitué avocat, l’affaire est plaidée sur le champ en l’état où elle se trouve, même en l’absence de conclusions du défendeur ou sur simples conclusions verbales ».

 

 

 

Une telle procédure serait tout à fait compatible avec les attentes du justiciable et pourrait permettre d’alléger considérablement tant la longueur des procédures que l’engorgement des Tribunaux.