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Sur la procédure de mise en état devant le Tribunal de grande instance

Le 18 avril 2013

En vertu des articles L. 211-3 et suivants du Code de l’organisation judiciaire, le Tribunal de grande instance connaît des litiges dont la valeur est supérieure à la somme de 10 000,00 euros, mais également de toutes les affaires civiles et commerciales pour lesquelles compétence n’est pas attribuée expressément à une autre juridiction.

 

Il est possible de saisir le Tribunal de grande instance, en cas d’urgence, selon la procédure à jour fixe, laquelle fera l’objet d’une étude séparée, ou selon une procédure plus ordinaire, étudiée ici.

 

En application de l’article 750 du Code de procédure civile (ci-après CPC), devant le Tribunal de grande instance, « La demande en justice est formée par assignation ou par remise au greffe d'une requête conjointe, sous réserve des cas dans lesquels le tribunal peut être saisi par simple requête ou par déclaration », étant cependant précisé que l’assignation constitue le moyen de saisine du Tribunal le plus usité.

 

Si l’assignation peut-être rédigée par huissier de justice ou par avocat, en pratique, cet acte est rédigé par l’avocat du demandeur, l’assistance des parties par un conseil étant obligatoire dans le cadre d’une procédure engagée devant le Tribunal de grande instance.

 

L’assignation est ensuite signifiée à la partie défenderesse par voie d’huissier de justice, le défendeur étant « tenu de constituer avocat dans le délai de quinze jours, à compter de l'assignation » conformément aux dispositions de l’article 750 du Code de procédure civile.

 

Après retour de l’assignation signifiée par l’huissier de justice, l’avocat du demandeur doit procéder au placement de l’assignation auprès du greffe du Tribunal de grande instance, « par la remise au greffe d’une copie de l’assignation », laquelle doit intervenir dans les quatre mois de la signification sous peine de caducité (art. 757 CPC).

 

La procédure est ensuite enrôlée auprès du Tribunal, le greffe lui attribuant un numéro de procédure propre.

 

Il est également délivré un bulletin de mise au rôle, précisant le cabinet auquel l’affaire sera attribuée, ainsi que la date et l’heure de l’audience de conférence présidentielle, première audience à laquelle sera appelé le dossier (art. 758 CPC).

 

Lors de cette première audience, le Président peut d’ores et déjà clôturer et renvoyer à une audience de plaidoirie les « affaires qui, d'après les explications des avocats et au vu des conclusions échangées et des pièces communiquées, lui paraissent prêtes à être jugées sur le fond » ou encore celles « dans lesquelles le défendeur ne comparaît pas si elles sont en état d'être jugées sur le fond » (art. 760 CPC).

 

Cependant, dans la pratique, l’intervention d’un avocat au soutien des intérêts du défendeur justifiera un renvoi à une audience de mise en état ultérieure, afin de permettre au défendeur de présenter ses observations par un mémoire, appelé « conclusions ».

 

Ainsi, après l’audience de conférence présidentielle, s’ouvre la phase de mise en état qui permet aux parties demanderesse et défenderesse d’échanger conclusions et pièces afin de répliquer aux arguments présentés par l’adversaire.

 

La procédure est alors instruite sous l’égide du Juge de la mise en état conformément aux dispositions des articles 763 et suivants Code de procédure civile, ce magistrat disposant de pouvoirs relativement larges :

 

-          Il doit veiller à la ponctualité de l’échange des conclusions et de la communication des pièces ; il peut entendre les avocats et leur faire toutes communications utiles, leur adresser, au besoin, des injonctions de conclure ou encore ordonner le retrait du rôle (art. 763).

-          Il fixe, au fur et à mesure, les délais nécessaires à l'instruction de l'affaire, eu égard à la nature, à l'urgence et à la complexité de celle-ci, et après avoir provoqué l'avis des avocats. Il peut accorder des prorogations de délai ou encore après avoir recueilli l'accord des avocats, fixer un calendrier de la mise en état (art. 764).

-          Il peut inviter les avocats à répondre aux moyens sur lesquels ils n'auraient pas conclu, à fournir les explications de fait et de droit nécessaires à la solution du litige et se faire communiquer les pièces versées aux débats (art. 765).

-          Il procède aux jonctions et disjonctions d'instance (art. 766).

-          Il peut entendre les parties (art. 767).

-          Il peut constater la conciliation, même partielle, des parties et homologuer, à la demande des parties, l'accord qu'elles lui soumettent (art. 768).

-          Il peut inviter les parties à mettre en cause tous les intéressés dont la présence lui paraît nécessaire à la solution du litige (art. 768-1).

-          Il constate l'extinction de l'instance (art. 769).

 

Afin de permettre au Juge de la mise en état de contrôler l’état d’avancement de la procédure et de « veiller au déroulement loyal » de celle-ci (art. 763), le dossier est régulièrement appelé à des audiences de mise en état.

 

Concrètement, il appartient au Président lors de l’audience de conférence présidentielle, puis au Juge de la mise en état de décider s’il renvoie la procédure à une audience de mise en état.

 

Cette audience peut se tenir soit en présence des avocats (mise en état parlante) soit au sein du cabinet du magistrat (mise en état silencieuse).

 

Une audience de mise en état silencieuse est une audience de cabinet, les avocats des parties n’étant pas convoqués, et le Juge de la mise en état décidant, au vu de l’état d’avancement du dossier et des observations présentées par les parties grâce à la communication électronique du RPVA, s’il convient de renvoyer le dossier à une prochaine audience de mise en état pour permettre aux parties de conclure ou si le dossier est en état d’être jugé.

 

Lorsque le dossier paraît en état d’être clôturé et jugé ou lorsque se posent des questions clés qui nécessitent une communication directe entre avec le juge de la mise en état et les avocats, les dossiers sont renvoyés en audience de mise en état parlante, à laquelle les avocats participent.

 

Par ailleurs, l’une des parties a la possibilité de soulever l’existence d’incidents en cours de procédure, tels que la nullité de l’assignation, l’incompétence du Tribunal saisi, une demande d’expertise ou de contre expertise, une demande de sursis à statuer, de provision, etc.

 

Dans ce cas, la procédure est renvoyée à une audience d’incidents, le Juge de la mise en état étant exclusivement compétent pour statuer par voie d’ordonnance sur ces demandes en application de l’article 771 du Code de procédure civile.

 

Enfin, lorsque les parties ont échangé leurs mémoires et que la procédure apparaît prête pour être plaidée, le Juge de la mise en état ordonne la clôture et la fixation de la procédure à une audience de plaidoirie, conformément à l’article 779 du Code de procédure civile.

 

Le dossier est ensuite débattu lors d’une audience de plaidoirie, laquelle se tient en formation collégiale ou à juge unique.

 

Après les débats, le jugement est rendu dans un délai de quatre à six semaines.

 

 

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La procédure au fond devant le Tribunal de grande instance est une procédure lourde, les délais entre la saisine de la juridiction et le jugement étant de l’ordre de 24 à 36 mois, voire plus en cas de pluralité de parties.