Monsieur et Madame X., propriétaires d’une maison d’habitation, ont fait donation de la nue-propriété de leur immeuble à la fille de la première union de Madame X., Madame Z..
L’acte notarié réservait l’usufruit gratuit et viager ; soit en l’espèce le droit d’habiter un immeuble en totalité ; au profit des époux X. et au profit du survivant d’entre eux.
Madame X. décède, de sorte que Monsieur X. conservait seul l’usufruit gratuit et viager de la maison, se maintenant ainsi dans les lieux.
Monsieur X. devait par la suite se remarier avec Madame Y.
Quelques années après leur mariage, le couple substituait au régime légal de la communauté le régime de la communauté universelle.
Monsieur X. décèdait quelques années plus tard.
* * *
Commencera alors pour Madame Z., héritière, une véritable BATAILLE juridique pour récupérer un immeuble dont la nue-propriété lui avait été donnée par son beau-père et sa mère prédécédée.
En effet, il sera rappelé que l’usufruit gratuit et viager n’était prévu qu’au bénéfice de Monsieur X. et Madame X. prédécédée, mère légitime de Madame Z.
Le contrat de mariage adoptant le régime de la communauté universelle était inopérant en l’espèce dans la mesure où l’usufruit gratuit et viager, prévu dans l’acte de donation du bien litigieux, n’était réservé qu’à Monsieur X.
Le décès de Monsieur X. ne pouvait conférer à Madame Y., même du fait du contrat de mariage, un quelconque droit à rester dans l’immeuble, laquelle devenait, au décès de son époux, occupante sans droit ni titre.
Néanmoins et coute que coute, Madame Y. entendait se maintenir dans les lieux.
Madame Z. n’a dès lors eu d’autre choix que de saisir le Tribunal pour obtenir l’expulsion de Madame Y.
En effet, il n’est pas possible d’expulser une personne occupant un immeuble, quand bien-même celle-ci est sans droit ni titre, sans l’obtention d’une décision de Justice.
C’est ainsi que le Tribunal d’Instance, compétent en la matière, a fait droit à la demande de Madame Z.
La juridiction saisie a en effet constaté que Madame Y. était occupante sans droit ni titre depuis le décès de Monsieur X., de sorte qu’il la condamnait à quitter les lieux dans un délai de 6 mois.
Madame Y. a interjeté appel, se complaisant à rester dans les lieux.
La Cour d’Appel confirmait quelques années plus tard que Madame Z. était bien et toujours occupante sans droit ni titre, de sorte qu’elle devait quitter la maison, lui octroyant toutefois encore un délai d’un an pour partir.
Madame Y., malgré deux décisions l’enjoignant de quitter les lieux, n’entendait toutefois pas se soumettre, de telle sorte qu’elle refusa de quitter les lieux dans le délai d’un an qui lui avait été accordé par la Cour d’Appel.
Passé ce délai d’un an, Madame Z. faisait en conséquence délivrer à Madame Y., selon les usages et sur la base des décisions de Justice du Tribunal d’Instance et de la Cour d’Appel, un commandement d’avoir à libérer le local affecté à l’habitation, accordant, selon les dispositions légales, un nouveau délai de deux mois à Madame Y. pour s’exécuter, faute de quoi il serait possible de procéder à son expulsion.
Madame Y., toujours aussi procédurière et pour se soustraire à ses obligations, saisissait le Juge de l’Exécution afin de solliciter un nouveau délai de trois ans pour quitter les lieux, faisant état de son âge et de la faiblesse de ses ressources.
Madame Z. a une nouvelle fois eu à justifier de son bon droit, rappelant et justifiant que Madame Y. bénéficiait de revenus confortables et qu’elle avait d’ores et déjà bénéficié de plus de 5 ans pour se reloger.
Le Juge de l’Exécution donnait pour la troisième fois raison à Madame Z. en refusant d’octroyer à Madame Y. de nouveaux délais pour s’exécuter.
Munie de cette décision, Madame Z. voyait se profiler la possibilité de récupérer la maison 6 ans après le décès de Monsieur X.
Cependant, les espoirs de Madame Z. devaient rapidement être réduits à néant.
En effet, il n’est possible d’obtenir l’exécution de décisions de Justice ordonnant l’expulsion qu’avec l’aide de la force publique.
L’huissier de justice mandaté par Madame Z. pour procéder à l’expulsion a ainsi sollicité l’octroi de la force publique pour procéder à l’expulsion de Madame Y.
Munie de trois décisions de Justice et après une bataille juridique qui a duré 6 ans, Madame Z. pensait enfin voir ses espoirs se réaliser.
Or, au plus grand désarroi de Madame Z., la Préfecture refusa l’expulsion de celle que Madame Z. aurait tendance à appeler la « squatteuse ».
Il semble en effet que les services de la Préfecture, refusant l’exécution de décisions de justice, aient des raisons que pourtant la Justice, par trois décisions, n’a pas retenues.
C’est ainsi que Madame Z. a été informée par le Préfet que, bien que sensible à la légitimité de sa demande et à sa situation personnelle, il n’entendait pas accorder le concours de la force publique eu égard à l’âge de Madame Y. et au fait qu’elle payait tous les mois une indemnité d’occupation (payée d’ailleurs après saisie d’huissier et non volontairement par Madame Y.).
Il en résulte ainsi que malgré pas moins de trois décisions de Justice en sa faveur, Madame Z. se trouve aujourd’hui dans l’impossibilité d’exécuter celles-ci et de prendre possession d’un bien lui appartenant.
Madame Z. propriétaire d’un bien immobilier se trouve dès lors dans l’impossibilité de l’occuper et contrainte de louer un appartement.
Il apparait que, quand bien-même la Loi prévoit le principe de l’expulsion d’un occupant sans droit ni titre, des mécanismes permettent malgré tout dans les faits de donner droit au contrevenant, suscitant chez le propriétaire un véritable sentiment d’injustice et au récalcitrant, un sentiment de toute-puissance.
Madame Z. se trouve en effet à ce jour dénuée de tout recours et se voit contrainte de laisser Madame Y. habiter dans la maison qui lui appartient, alors même qu’il n’existe aucune disposition légale faisant de l’âge et du paiement d’une indemnité d’occupation une exception à l’exécution d’une décision judiciaire d’expulsion.